mardi 23 août 2011

La vie d'un homme

Intriguée par les commentaires d'un film à venir sur Canal, je tombe par hasard sur ce texte de Maxime Le Forestier.

Texte que je reconnais aussitôt : nous l'avions "étudié" en seconde avec une enseignante plutôt démago. Du genre à raconter sa vie au lieu de faire cours, à nous abandonner deux heures dans une salle avec un vague sujet de rédaction*, et en l'occurrence à proposer d'étudier une chanson de notre choix...
Un camarade avait apporté son disque (33 tours !), elle avait photocopié le texte de la chanson et... consciencieusement démoli le texte et sa pauvreté. Je me souviens encore de l'air interloqué de l'élève lui disant que ce texte était dédié à Pierre Goldman. "Comment le sais-tu ? - Ben... c'est écrit là..."

D'où je conclus bien des années après que mon professeur de français de lycée ne s'intéressait pas plus que moi à l'actualité... Quand je pense comme je suis restée longtemps traumatisée par celle qui m'a accompagnée deux années durant au collège dans le goût des mots et des auteurs, traumatisée par une réflexion acerbe sur notre désintérêt de l'actualité, sur l'indignité des êtres humains qui ne se tenaient pas au courant de la vie de la cité et de l'état du monde...

Ces dernières années j'aurais bien souvent préféré être à nouveau bien loin de ce quotidien-là pourtant et pouvoir sans effort, sans y penser, m'abstraire de ce flot d'informations de moins en moins dignes, de plus en plus affligeantes...



Tiens, cela me rappelle un autre souvenir de ce passé décidément bien révolu : la trêve de Pâques et de Noël qu'observaient les journalistes dans un autre siècle...

Les souvenirs sont choses bien étranges, à l'improviste j'aurais juré que cette séance, comme celle des deux heures en "autonomie", avait eu lieu au collège. Mais la date ne permet aucun doute, et en effet jamais Madame V. n'aurait eu pareille attitude ! Non, c'était bien cette étrange enseignante de seconde qui nous parlait un bon quart d'heure de ses cartes de visites avec un faute de français "un comble pour une ???" (il me semble qu'elle nous parlait de son grade universitaire mais je n'en suis plus du tout certaine).
Et tout naturellement me revient alors le souvenir de notre professeur de lettres en première. Madame A. brillante et lointaine, mais d'un physique lourd à porter, et pas mal chahutée, quand je buvais ses paroles et ses analyses de poèmes. Elle continuait imperturbable à lire, expliquer, révéler la magie des textes...



* Et je me souviens comme si c'était hier du poème écrit en capitales rouges par un camarade dont nous découvrions à cette occasion l'engagement...

lundi 8 août 2011

Le silence est d'or ?

Le poids des mots n'a rien d'un slogan en ce qui me concerne. Aussi loin que remontent mes souvenirs la puissance du verbe a toujours été une réalité quotidienne. Un seul mot peut faire surgir, à l'instant, une scène d'une redoutable précision. L'impact d'une phrase peut me déséquilibrer physiquement, et résonner encore des années et des années plus tard.
Alors il est devenu bien rare que les mots jaillissent sans réflexion hors de ma bouche. Et dans une situation difficile, parfois, je tente de ne pas même penser certains mots parce que ce serait donner à une réalité que je refuse une force démesurée, insupportable.
Le dilemme est que ces mots "bloqués" ne disparaissent pas pour autant, que ce qui n'a pas été dit n'a pas été réglé non plus, que personne n'a pu atténuer la violence qu'ils véhiculent, ou offrir un regard neuf et la distance nécessaire pour faire la part des choses.

Affrontement brutal, inquiétant, incompréhensible hier soir. Impossible d'en parler à quiconque. Mise à distance en guise de mode de survie. Sauf que je n'ai pas aimé ce refuge là, sauf que j'ai eu l'impression d'un deuil intime.

Alors j'essaie quand même de mettre quelques mots sur les choses, sans les dire, mais en y réfléchissant il me semble.