vendredi 28 janvier 2011

La pluie qui brille

Etrange période entre fatigue et énergie rayonnante, entre déprime et conviction, entre solitude et belles rencontres du quotidien.

Une fatigue prégnante et ce n'est pas le décompte des jours qui restent qui va m'aider à l'oublier !
Une énergie qui m'épate parfois moi-même, question de survie aussi il faut dire quand il faut tirer ou porter à bout de bras non seulement des élèves apathiques mais aussi un adolescent à la maison...
Déprime persistante dont je n'arrive pas à bien cerner les raisons. Certes le moindre rayon me laisse entendre que la saison n'y est pas pour rien, mais l'hiver n'explique pas tout. Bien sûr le temps passe, mais quand j'ai l'occasion de me retourner sur le chemin parcouru, non ce ne sont pas les regrets qui dominent. Le désarroi dans lequel me plonge le monde tel qu'il va, oui sûrement, mais je reste une incorrigible optimiste lorsqu'il s'agit de l'humanité. Les coups successifs que nous prenons derrière la tête ? Ah, oui, aussi quand même. Ce doit être la conjonction de l'ensemble...
Et peut-être que le contrecoup en est justement cette certitude qui m'anime, cette volonté d'avancer, ces projets plus ou moins raisonnables, ce désir intact de partager mon amour des mots et des livres, ces batailles usantes parce que toujours recommencées pour affirmer qu'il y a du bon en toutes choses et en tout être. (Mais oui, mais oui, parfois j'ai du mal à m'en convaincre moi-même avec certains ! Mais l'idéal en reste bien vivace malgré tout).
La solitude. Ah là, c'est un problème aussi récurrent que majeur et qui ne risque pas d'être résolu de sitôt. De toutes façons je n'arrive pas à savoir ce que je veux vraiment. C'est juste devenu un peu plus pesant lorsque j'ai franchi le demi-siècle : les possibles s'amenuisent tout de même !
Mais au jour le jour que de lumières, de sourires, de merveilles entrevues, de petits plaisirs sans prix...

Ce salut chaleureux qui s'accompagne d'une main juste posée sur mon dos
Cette inquiétude désintéressée pour ma santé
Ce remerciement enthousiaste pour trois fois rien
Cette approbation qui fait tant de bien
Ce si gentil "Bonjour, Madame, vous allez bien ?"
Ce regard émerveillé
Ces élèves impatients de répondre, tout étonnés de découvrir leur propre savoir hors les murs de la classe
Ce compliment de l'intervenante sur nos élèves si mal perçus dans la ville
Ce petit signe amical de cette amie qui croule pourtant sous les soucis familiaux
Ce tutoiement spontané après des années corsetées
Ces partages si généreux entre inconnus partageant seulement les mêmes difficultés
Voir aussi l'adulte autonome qui se dessine sous l'ado rebelle
Entendre sa fierté devant la réussite à laquelle il prétend n'attacher nulle importance
Le rayon qui perce et modifie radicalement l'atmosphère

Et, encore une fois, mais c'est tellement vrai, lire ici et là, jour après jour, d'autres vies quotidiennes, entre humour libérateur et colère exprimée, entre révolte et engagement, entre poésie et provocation, entre tendresse, beauté et courage...

Et vous ? Une liste de petits bonheurs, ça vous dit ?


lundi 24 janvier 2011

Vanité, vanité

19 h 22, il m'a quand même fallu tout ce temps pour revenir à une juste vision de choses...
Rien de grave pourtant. Juste un déplaisir qui a duré plus qu'il n'aurait dû. Juste un mot pour un autre.
Mais non, finalement, je ne veux être que ce que je suis.
Alors puisqu'il n'est pas question de devenir autre - ni autre qui m'exaspère, ni autre qui triche, ni même autre dévouée et corvéable à merci - il faut aussi accepter de ne pas recevoir les mêmes compliments.
D'autant que ces compliments, à bien y réfléchir, je n'y aurais pas cru de toutes façons.
Allez, sans regret.
Au moins j'aurais sérieusement réfléchi à la question de l'image et de l'identité. Et retrouvé une vision plus claire de ce qui compte pour moi.

vendredi 21 janvier 2011

Ames soeurs

Est-il vraiment possible de connaître quelqu'un ? La question me trottait en tête, mais en la formulant, une évidence s'est imposée.
C'est presque une constante d'ailleurs, formuler une pensée permet bien souvent de découvrir une réponse qui ne demandait qu'à naître à la conscience...
Et donc, là, en "posant" la question, me reviennent aussitôt les souvenirs de rencontres fulgurantes. Encore que le mot prête à confusion. La certitude de comprendre et d'être compris procure plutôt un sentiment de paix, une harmonie tranquille que la semi violence évoquée par le mot fulgurance - sauf à le choisir pour ce monde qui se déploie en moins d'une seconde. Une paix pareille à ce lac calme qui, paraît-il, permet de garder la maîtrise de soi dans les conditions psychologiques extrêmes. (Déjà faudrait-il, dans ces moments-là, être encore capable de penser à la technique en question !)

Or donc, je crois que c'est parfaitement possible. Bien mieux, je le sais d'expérience. Connaître quelqu'un d'évidence, le reconnaître comme une âme soeur.

Pourquoi donc cette interrogation ? Parce qu'elle revient assez fréquemment me semble-t-il sur les blogs. Ce doute à propos de la valeur d'une rencontre virtuelle.
Bien sûr, il est vraisemblable que nombreux sont les internautes qui s'attachent à ne laisser paraître que la meilleure part d'eux-mêmes. Sans aucun doute même ceux qui cherchent à être aussi vrais et sincères que possible sont-ils parfois trahis par l'acte même de s'exposer et de le faire par écrit - un filtre puissant assurément.
Mais tout de même, plus on écrit, plus on se livre, même sans le vouloir. Souvent sans s'en apercevoir, ou en le réalisant après coup, parfois même de façon abrupte une fois confronté à la réaction d'un visiteur.

Et donc, il me semble, oui, que ceux qui m'emportent depuis des jours ou des mois sur les ailes de leurs mots ressemblent à l'image que je m'en fais.
Une image mentale, une impression, rien d'un portrait physique, ni même d'une quelconque analyse. Juste comme ces visages inconnus qui en évoquent irrésistiblement d'autres bien plus familiers, juste comme ces gestes qui éveillent un souvenir que l'on ne savait pas si prégnant, juste comme ces histoires qui font tellement écho que l'on perd le fil de la discussion... pour y retomber sur un mot comme déjà entendu avant même qu'il ne soit prononcé.

Comme une petite soeur de M. si sage, si douce, toujours positive même face à sa propre souffrance. Une autre V., tornade intransigeante mais toujours attentive et présente aux autres. Comme ce condisciple à l'élégant mystère que je n'ai jamais osé aborder. Comme une belle personne aussi bienveillante et généreuse que F., aussi directe que réfléchie. Un autre A., clair et assuré, sans jamais être tranchant pour autant, un A. qui trouverait même là une autre de ses facettes, la passion parfois brutale d'A. M., ou encore l'irrésistible bonheur de vivre tellement communicatif de MP.

La famille humaine, je le ressens parfois si profondément que je ne peux qu'y croire, de tout mon être. Famille toujours recomposée, toujours renaissante, aussi multiple que semblable à chacun de ses membres. Et dans cette famille ceux dont il est plus facile de se sentir proche. Mais aussi, par le miracle de l'écrit et de la distance, ceux auprès de qui on resterait paralysé en face à face, ou faussement distant dans une même pièce, mais qui, de message en message, se révèlent bien plus qu'accessibles, bien plus que chaleureux : pairs.





Et la liste serait bien plus longue si je devais recenser toutes ces personnalités qui me retiennent ici longtemps, longtemps, de plus en plus longtemps, jour après jour.

samedi 8 janvier 2011

Auspices

Bon, l'année nouvelle en est déjà à son huitième jour d'existence.
Quelque chose aurait-il changé ?

Un vrai sourire un matin. Cadeau des plus inattendus, étant donné que les sourires deviennent denrée rare chez certains (?) ado, et que les matins sont plutôt des périodes d'énervement intense...
Un dessin offert par une petite élève très, très timide qui a cependant osé venir me l'offrir devant ses camarades à la fin de l'heure.
Un "Bonjour madame Axel !" sonore et tout à fait sincère devant le portail où la plupart des élèves deviennent brutalement aveugles et sourds à l'approche d'un enseignant.
Des voeux qui ne pèsent pas alors que je redoute d'ordinaire la tournée obligatoire, il m'a semblé que tout le monde était souriant et de bonne humeur, y compris ceux qui prétendent mal supporter les embrassades, même les personnes d'ordinaire un peu hautaines ont souri.
Une collègue qui prend des nouvelles de ma santé juste parce que j'avais mentionné la veille un muscle douloureux causé par le froid intense qui régnait dans les salles. Une collègue dont je ne cesse de découvrir les qualités quand je l'avais bien trop vite cataloguée quelques semaines après son arrivée. Mon instinct ne doit plus du tout être aussi sûr que je le croyais...
Un projet monté à toute vitesse un jour plus que chargé mais fini dans les temps. Les projets transversaux, je veux bien, mais les critères de choix il va falloir que je les trouve ! Documents ouverts le jeudi midi pour le lundi suivant... Réunion officielle - évidemment inutile et obligatoire - le jeudi soir, et l'autre participante absente le vendredi... Un dossier de cinq pages par élèves monté, photocopié, agrafé le vendredi. Je suis carrément fière de moi !
Des réveils matinaux certes toujours aussi difficiles mais vite oubliés : la fatigue ne dure pas.
Des bruits lancinants chez les voisins le samedi matin, en plus des volets claqués avec vigueur tous les jours de l'année à 7 h... mais ce matin je me dis juste que cela va me permettre d'employer utilement toute ma journée. Et de fait, deux lessives, les décorations de Noël à la cave, un peu de ménage, la boulangerie, et il me reste encore du temps pour faire un tour par ici avant midi !
La disparition du sapin qui transforme le salon : il avait fallu réaménager un peu pour lui trouver une place, puisque le jeune homme voulait "un vrai sapin, et un grand !" Et du coup, je redécouvre l'espace. Pas tout à fait satisfaisant, mais l'idée se précise peu à peu d'un nouvel agencement.

Je ne sais si quelque chose a changé mais il semblerait que ce début d'année s'annonce sous les meilleurs auspices.